30 nov. 2012

In God We Trust (23)

Je l’avais entendu de la bouche de Raoul : Mauser est un dur à cuire. Mauser en a vu des vertes et des pas mures, là-bas, en Algérie. Il était dans les paras. Je n’en doutais pas, mais quand je me suis retrouvé devant lui, j’ai eu une remontée de plat du jour. Ça s’est crashé droit sur les doigts de pieds d’Eddy : bon sang, Eddy, comment tu peux sentir la pourriture à ce degré de quasi-perfection ? J’avais dit ça, rapport aux Yougos. L’établi, sur ma gauche.
Un étau.
Je fixai la jambe droite à la quatrième marche : la cuisse liée avec un chiffon graisseux, le mollet avec un fil à plomb. À un montant de l’escabeau, je vissai l’étau, les mâchoires verticales, à hauteur du genou.
Une éponge à vaisselle humide dans la bouche et un bout de Rubson pour colmater. Les cris de douleur de Mauser. L’ampoule était encore plus poisseuse. Les Yougos digéraient.
Je commençai par un tour complet.
Histoire de planter le décor.
La rotule était bien enchâssée.
Et je me suis dit : il faudrait, à chaque quart de tour, dire quelque chose qui donnerait à Eddy le sentiment de ne pas se faire torturer pour rien.
Je suis sorti sur le pas de la porte pour réfléchir.
Puis je repensai à l’épisode des Sirènes…
« Pieds et poings liés, debout sur l’emplanture, fais-toi fixer au mât pour goûter le plaisir d’entendre la chanson, et, si tu les priais, si tu leur commandais de desserrer les nœuds, que tes gens aussitôt donnent un tour de plus ! »
Le genre de chanson irrésistible. Après ce n’est qu’une affaire de quarts de tour.
C’est étonnant comme les globes oculaires d’Eddy étaient ronds.

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