7 janv. 2013

Hypermarché (4)

[Jesse n’est pas con. Jesse sait que la Vierge de la Guadalupe viendra le libérer du corps de Jesse.]

Le papa de Jesse est parti depuis longtemps. Jesse était tout petit. Pas plus gros qu’une boule de maïs soufflé sortie d’une boîte de Captain MIKI pour le petit déjeuner. La maman de Jesse était très belle. Elle disait en regardant Jesse : « Je t’aime. » Puis elle retombait dans le sommeil. Elle a dormi pendant vingt ans dans le grand lit du premier étage. Les agents de sécurité de Captain MIKI étaient très gentils avec maman. Ils venaient souvent à la maison pour écouter ses organes et lui donner à manger par un tuyau transparent. Ils disaient : « Ta mère est extraordinaire, elle n’a aucun escarre, mais elle devrait se décider à reprendre une vie normale, malgré tout. Elle est encore jeune. ». Jesse pensait que les agents de sécurité de Captain MIKI ne comprenaient pas maman.
« Je t’aime. »
« T’es pas tout seul ? Y a du monde là-haut ? »
Maman venait de crier ses trois mots. Jesse savait décrypter chaque inflexion de sa voix, la quantité de chaque syllabe, longue ou brève, selon que maman veuille dire « Il manque » ou bien « Demain ». Jesse était un enfant aimant et intelligent. Il comprenait tout. Les agents de sécurité de Captain MIKI ne comprenaient pas bien maman. Ils disaient que Captain MIKI était comme un père pour Jesse. Ils disaient que les collaborateurs, les agents de sécurité, les actionnaires, le Conseil d’administration de Captain MIKI et Jesse formaient une grande famille. Ils disaient que Jesse était le sommet de la pyramide (∆).
« Je pourrais peut-être remettre le message, en main propre, à la personne qui se trouve là-haut ? »
Jesse se posta devant les escaliers. Le collaborateur comprit que Jesse ne voulait pas.
Alors le collaborateur regarda Jesse en se grattant la tignasse blonde. La prothèse MIKI dit [:¬].
« Je vais te lire le message. »
Le chien Gluten retourna aux défécations vanillées du salon. Le collaborateur tira une enveloppe de la poche inférieure de son pantalon réglementaire — froissement du tissu.
Cela faisait cinquante-deux minutes que Jesse n’avait pas mangé. Dans quelques secondes la faim féroce lui dévorerait les boyaux. Alors, Jesse devrait manger sans attendre. Le collaborateur devait absolument comprendre qu’il fallait délivrer le message — immédiatement — et repartir sur son vélo. Jesse devait coopérer avec les collaborateurs de Captain MIKI. Mais il était impossible à Jesse de ne pas nourrir la faim qu’il sentait grossir dans son dedans.
Alors l’orifice supérieur de Jesse s’ouvrit à la recherche d’un son. Mais le son ne vint pas.
« Putain, mec, tu fais quoi là ? Attends un peu avant de me bouffer, j’ai un carton plein de ces foutus Captain MIKI dans le caisson de ma bécane. Bouge pas, mec, j’en ai pour deux secondes. »
« Merde alors. » La prothèse MIKI dit [8¬|].
Le collaborateur n’avait donc jamais vu Jesse faire son show les jours de soldes ? Sinon le collaborateur aurait su que Jesse était doué pour ouvrir les boîtes cartonnées Captain MIKI avec la langue et manger le contenu en moins d’une seconde. Jesse devait manger beaucoup de Captain MIKI pour garder la forme entre les soldes.
« On dirait un serpent tout rose. »
Douze défécations vanillées sortirent en chapelet de l’orifice bas de Jesse.
Gluten ne bougea pas. Le chien Gluten était trop petit pour ingurgiter toutes les merdes vanillées de Jesse. Des collaborateurs de Captain MIKI venaient alors tous les jours pour  ramasser le surplus laissé par Gluten.
« Bien, voici donc le message : Cher Jesse, Captain MIKI a le plaisir de t’inviter à sa grande journée promotionnelle. Cette saison, Captain MIKI s’est engagé à reverser 50% de ses bénéfices à la lutte contre l’obésité. »

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