25 sept. 2012

Terra incognita : toilettes

Madame,

Les lieux d’aisances possèdent beaucoup de mots pour les désigner, mais aucuns qui soient aussi francs du collier que chiottes (du verbe chier) ou gogues (de goguenot, pot à cidre). Par euphémisme, vous lui préfèrerez les toilettes, mot qui procède de la métonymie, puisque venant de toile, il a, par cercles concentriques centrifuges, successivement désigné les instruments de beauté que les dames disposent sur ladite toile, la table elle-même, le cabinet, puis, les choses étant ce qu’elles sont — vous accorderez qu’on n’y peut rien —, la pièce collective où vous allez vous refaire une beauté et qui se trouve être aussi l’endroit où vous chiez et pissez, du moins, au restaurant, au cinéma, dans les grands magasins et chez les particuliers qui n’ont pas de pièce dédicacée au seul saint goguenot. D’où le faux pas que vous ne pardonneriez pas, si un étourdi quelconque confondait vos toilettes avec vos toilettes, prenant aisances sur vos robes et vos chemisiers en lieu et place des vécés, autre nom euphémistique, délicieusement francisé depuis l’américain ferroviaire water closet, cabinet d’eau.
Ceci étant dit, permettez de vous dire en quoi les toilettes sont une terra incognita.
Rien à voir avec le sceau du secret qui, pudiquement, doit recouvrir tout ce que vous y entreprenez. C’est une terra incognita parce qu’ici, surtout, intensément, quotidiennement, méthodiquement, je pense à vous,
bien affectueusement, votre très humble et dévoué capitaine Dupré.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire